Günter Brus – L’art du body pain-ting

Ça shockait mieux avant : l’Actionnisme viennois – Günter Brus

Et si nous faisions un petit voyage dans le temps, à une période où on savait shocker et surtout parler :

« L’homme est une sculpture, recouverte de peau. »

« Notre propre corps est un poème qui parle de la mort de la matière. »

« Un art qui cesse d’être outrage à la pudeur n’est pas de l’art. »

« L’homme du commun est le crétin général, le jus dont on remplit le gros stylo. Tout homme normal est un idiot embauché par Dieu pour son industrie imbécile. »

Là, on se dit que l’auteur de ces propos aurait mérité de s’appeler Grand Corps Malade et que son œuvre va être autre chose qu’un grand dadais qui scande des rimes plus ou moins pathétiques.

Et bien, c’est pas faux. Notre homme s’appelle Günter Brus et si son corps n’était sans doute pas malade à l’origine, on peut se dire que le traitement qu’il va lui faire subir au nom de l’art, n’a pas laissé son enveloppe charnelle intacte, que du contraire.

Car le truc de Günter c’est l’automutilation.

Non, rien à voir avec les petites coupures de cutter de certains ados en souffrance. Non, lui joue dans la cour des grands.

Auto-Mutilation - 1965
Auto-Mutilation – 1965

Voici, pour vous donner une idée du talent de l’artiste :

Selbstverstümmelung (Auto-Mutilation), 1965

En 1968, sans doute emporté par l’élan de liberté qui traverse l’Europe cette année-là, voilà que Günter décide, avec quelques potes dont nous reparlerons plus tard, de réaliser une performance encore plus folle, dans un amphithéâtre de l’université de Vienne, intitulée : Kunst und Revolution. Voici une description de la performance :

«Brus était nu. Pendant l’hymne autrichien, il se taillada tout le corps à la lame de rasoir, faisant apparaître un motif de sang rouge et de peau blanche. Rouge-blanc-rouge (drapeau autrichien). Il chia ensuite sur sa main droite et s’en barbouilla.» (Lettres à ErikaPresses du réel, 2004)

Il boit son urine, recouvre donc son corps de ses excréments et surtout se masturbe en chantant l’hymne nationale autrichien et ça c’est vraiment, mais vraiment pas bien, d’ailleurs il sera condamné pour cela à six mois de prison. Il y a des choses avec lesquelles on ne rigole pas.

Bien que : «Lors de l’audience, l’avocat général lui dit en souriant: “Monsieur Brus, je suis un admirateur de votre art, mais comment faites-vous pour déféquer exactement au moment prévu?” et les jurés de rire à pleine gorge.» (Lettres à Erika – Presses du réel, 2004) 

En tout cas, cela ne le calme pas

Que du contraire. Il est temps pour lui de réaliser son chef d’œuvre : Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement. Et c’est peu dire. C’est un Günter, qui a revêtu pour l’occasion des porte-jarretelles, qui se présente ce jour-là et commence par s’ouvrir les jambes sur la longueur avec un rasoir, puis le crâne. Mais à vouloir trop bien faire, ce qui devait arriver arriva, et il s’en fallut de peu qu’il meure sur scène, comme les grands dramaturges. Ce sera en tout cas sa dernière performance.

Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement
Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement
Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement
Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement
Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement
Zerreißprobe, Tentative d’auto-déchirement

4 réflexions sur “Günter Brus – L’art du body pain-ting”

  1. C’est fou comme cette photo me rappelle ce film où le « méchant » accrochait sa victime sur un lit en fer et se suspendait au dessus elle, accroché par des boucles qui lui traversaient la peau du dos 🙂

    1. Ichi, si c’est de lui qu’il s’agit, est un grand homme. A mon avis on devrait reparler de lui et de ses amis, très prochainement sur Shockyou !!!
      Un grand amateur de crevettes frites :-)

  2. Je me demande ce que ça donnerait de voir un de ces artistes débouler un jour sur « Belgium’s got talent » 🙂 Ca serait comique, non ? 🙂

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